🗑️ Pas de changement pour Michel : ses erreurs en 4 points
Voici comment Michel a raté sa gestion du changement. Il avait pourtant tout fait comme il fallait, mais il n’a pas réussi à mobiliser ses équipes et pire, il a dû faire face à une résistance pénible.
Ce blog est un inventaire d'échecs cuisants et récurrents permettant de bien rater sa transformation organisationnelle ou sa gestion du changement, du moins la rendre laborieuse et pénible pour tous. Heureusement on y fait des apprentissages pour faire mieux.
Mercredi 19 avril, j’ai donné une conférence lors du Colloque PMI 2023 sur comment rater sa gestion du changement efficacement. Je n’ai pas pu parlé d’échec sans parler de Michel. Et je ne pouvais pas garder cela sur un Power Point caché dans mon ordi. Alors, j’en ai fait un article de blog.
Voici donc l’histoire de Michel.
Gestionnaire aguerri, il a suivi plusieurs formations en gestion du changement et ce n’est pas le premier projet qu’il gère. Il avait pensé à tout. Mais le problème, c’est que c’est toujours pareil. Changer, c’est laborieux. Dans le fond, les gens de veulent pas changer, se dit Michel.
Il n’a pas tout à fait tort. Gérer le changement, c’est difficile. D’ailleurs plusieurs études démontrent que le taux d’échec de la gestion du changement est entre 60 et 70 %. À ce stade, ce n’est plus un échec, c’est une gifle. C’est aussi facile de rater sa gestion du changement que de vouloir faire rentrer un ballon de basket dans un gobelet.
Mais alors qu’est-ce qui ne va pas ? Comment fait-on pour échouer aussi souvent et facilement ? Qu’est-ce qu’il fait Michel ?
Et bien, Michel a fait comme tout le monde, il s’est trompé sur 4 points.
1. Il a attendu que le changement soit clair.
Il s’est dit qu’il allait attendre que les choses soient plus claires avant de se lancer dans des activités de gestion du changement. Il ne faudrait pas commencer à soulever des inquiétudes et des tas de questions auxquelles on ne sait pas répondre.
Et quand le projet a commencé sa phase de mise en œuvre, accompagné de gestion du changement, Michel a dû faire face à des grognons. Ils disaient que le projet était nul.
“Mais c’est nul cette solution !
Pourquoi on ne nous en avait pas parlé avant ?
Pourquoi ils nous déploient cela maintenant ?”
En fait, ces gens ne sont pas nés grognons. Il le sont devenus.
C’est Michel qui a créé cette résistance en ne communiquant pas assez tôt. On a tous besoin de cheminer pour changer, et eux, on ne leur a pas laissé le temps. Et puis quelque part, ce sont les experts de leur métier. Les consulter aurait été la moindre des choses. Personne n’aime que l’on pense à notre place.
Pour changer, on a besoin de comprendre, d’être d’accord, de se sentir écouter et d’apprendre. Si ces étapes ne sont pas respectées, on crée de la résistance.
Ajoutons que le problème du changement, c’est qu’il n’est jamais clair. On ne sait jamais vraiment ce qui va changer. On va le savoir petit à petit. Et ce, en enquêtant auprès des concernés. Donc attendre que le changement soit clair est un non sens.
Cela révèle surtout la peur de Michel a devoir faire face à quelque chose qu’il ne peut pas contrôler.
2. Il a bien écouté les préoccupations des gens mais il n’a rien pu faire avec.
Son conseiller en gestion du changement a organisé une série d’ateliers de travail pour écouter les préoccupations des gens qu’il a ensuite soigneusement rapporté à Michel.
“Et Maintenant, à toi de jouer Michel. Il faut gérer les préoccupations”.
Michel était bien embêté. Il ne savait pas comment faire.
À vrai dire, c’était impossible. Le projet est déjà tout bien ficelé : solution choisie, planification réalisée, communications rédigées, formation prête. Il n’y avait plus tellement de marge de manœuvre… Il a tenté de les rassurer avec une présentation Power Point mais il a mis de l’huile sur le feu.
Quand le changement est déjà construit, c’est trop tard pour mobiliser les gens. Essayer de les faire adhérer, c’est surtout essayer d’atténuer quelque chose qu’on a créé. En réalité, il ne faut pas faire adhérer les gens, il faut les mobiliser au travers du processus.
Michel aurait dû construire le changement avec les gens.
3. Il s’est attaché à une vision et des bénéfices flous.
Voici la vision qu’a pondu l’équipe projet :
Moderniser nos systèmes informatiques pour une plus grande efficacité et une plus grande création de valeur.
Et voici les bénéfices écrits dans la documentation de promotion :
Environnement de travail moderne permettant des services émergents aux utilisateurs, une plus grande efficience, et meilleure organisation du travail.
Il aurait mieux valu ne rien écrire. Personne n’a rien compris.
Ces phrases auraient d’ailleurs pu correspondre à n’importe quel projet informatique dans n’importe quelle entreprise.
Qu’est-ce que cela veut dire moderniser ? Cela sous-entend quoi “efficace” ? C’est quoi la “création de valeur”. Normalement une vision sert à donner envie de changer. Là, c’est raté.
Une vision doit être simple, compréhensible par tous.
On doit y voir le futur que l’on veut bâtir.
Et surtout, on doit voir le plan d’action qu’il y a derrière.
Quand Patagonia écrit “Everything we make has an impact on the planet”, on imagine toutes les actions que les équipes vont devoir faire pour atteindre cette vision.
Quant aux bénéfices, on a trop souvent tendance à rester en surface et oublier de dire les vrais avantages que l’utilisateur va trouver pour son propre compte. Posez-vous la question “Et alors” 5 fois de suite pour trouver les vrais bénéfices pour les gens. Le “what’s in it for me” se cache derrière votre dernière réponse.
C’est la même technique que les “5 pourquoi” qui permet de trouver les causes fondamentales en résolution de problème.
4. Enfin, il a tout misé sur la gestion de projet.
Michel avait ajouté la couche gestion du changement à son projet (en vert ci-dessous), comme tout le monde. L’idée étant de bien adresser le volet humain.
Mais voilà, tous les autres faisaient pareil dans leur coin. Et tout le monde s’adressait aux mêmes personnes, les projets étant interreliés.
Résultat : pas de synchronisation des activités et des communications.
L’autre problème de Michel, c’est qu’il avait écarté le leadership du changement sans faire exprès.
Là je vous invite à lire un article précédent qui explique précisément ce point.
J’y explique que faire de la gestion du changement a pour but de bâtir la confiance, or les activités de gestion du changement n’atteignent pas cet objectif. La confiance émerge avec le leadership. Parce que ce qui est important, ce n’est pas tant ce que vous faites mais comment vous le faites.
Pour conclure
Voici ce que Michel aurait dû faire :
1- Informer en continu
2- Construire le changement avec les gens
3- S’attacher à une vision claire et des vrais bénéfices
4- Organiser une gestion du changement globale et penser au leadership du changement
En réalité, la gestion du changement relève bien plus de la stratégie d’entreprise qu’une activité de projet. Finalement, l’erreur de Michel, c’est d’avoir voulu faire de la gestion du changement.
J’ai écrit un article complet sur l’échec de la gestion du changement, pour le lire c’est par ici.
Merci pour votre lecture.
Vous pouvez aussi :
Lire les articles déjà publiés.
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